Élection BAD 2025 : la CEMAC réaffirme sa volonté d’impuissance
L’élection du nouveau président de la BAD était une occasion pour la CEMAC de montrer qu’elle pouvait parler d’une seule voix, défendre une ambition régionale. Mais cette occasion a été manquée, une fois de plus.
Le candidat soutenu par la CEMAC, Abbas Mahamat Tolli, ex gouverneur de la BEAC, n’a même pas franchi le premier tour de scrutin. Il a récolté 0,52 % des voix. Ce chiffre est plus qu’un échec : c’est un symbole fort. Il montre que la CEMAC n’a pas su se mobiliser pour son propre candidat, et qu’elle continue à s’auto-marginaliser sur la scène africaine.
Le vote à la BAD : une mécanique exigeante
Pour bien comprendre la gravité de cet échec, il faut revenir au mode de désignation du président de la BAD :
👉 Le vote est effectué généralement les ministres des Finances ou les gouverneurs des banques centrales de chaque pays membre.
👉 Chaque pays a un poids de vote proportionnel à sa part dans le capital de la banque.
👉 Pour être élu, un candidat doit réunir deux majorités :
• Au moins 50 % des votes des pays africains membres (dits “régionaux”),
• Et au moins 50 % des votes des pays non africains (comme la France, le Japon, les États-Unis, etc.).
👉 Si personne ne remplit ces deux conditions, on passe à un autre tour. Les candidats les moins soutenus sont progressivement éliminés.
En clair : c’est un test de crédibilité, d’influence et de stratégie régionale.
Une sous-région incapable de s’unir
Même si les pays de la CEMAC n’ont qu’un poids limité dans le capital de la BAD, ils auraient au moins pu faire bloc derrière leur candidat. Voici leurs parts respectives dans le capital de la Banque :
• Cameroun : 1,00 %
• Gabon : 0,44 %
• Congo : 0,38 %
• Guinée équatoriale : 0,06 %
• Tchad : 0,06 %
• Centrafrique : 0,03 %
👉 Total : environ 2 % du capital.
Mais Abbas Tolli n’a même pas obtenu ces 2 %. C’est une faute politique grave. Un signe de désunion profonde, même dans un combat symbolique.
Une impuissance devenue habitude
La CEMAC n’a pas été battue par manque de poids économique, mais par manque de solidarité, de diplomatie et de vision stratégique.
Depuis des années, elle agit en ordre dispersé. Aucun message clair, aucune stratégie d’influence à long terme. On se contente d’annonces tardives, de soutiens timides, de calculs égoïstes.
Une famille à recoller
La CEMAC est une famille. Une famille blessée, divisée, parfois silencieuse. Mais une famille quand même.
Il est temps de revenir à l’essentiel : se parler, se respecter, se défendre mutuellement. Il faut du souffle politique, de la confiance, et une capacité réelle à construire une parole commune.
Si nous continuons à choisir l’impuissance, le reste du continent continuera de nous ignorer. Et ce ne sera pas la faute des autres.
Par Charles Menye
Président du Comité Citoyen de Vigilance Financière – CEMAC