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Sommet sur l’IA de Paris : entre coordination et domination, des points de vue divergents

►►Le Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle (IA), qui s’est achevé mardi à Paris, a révélé une fracture profonde entre différentes visions de l’avenir de cette technologie. Cinquante-huit pays, dont la France, la Chine et l’Inde, ainsi que l’Union européenne (UE) et la Commission de l’Union africaine (UA), ont signé une déclaration appelant à une IA « ouverte », « éthique » et « inclusive ». Cette déclaration n’a pas été signée par le Royaume-Uni et les Etats-Unis.

PARIS-La déclaration vise à renforcer la gouvernance mondiale de l’IA, à empêcher une concentration excessive du marché et à favoriser un accès équitable aux avancées technologiques. Washington refuse cependant d’adhérer à l’initiative et défend une approche plus libérale de l’IA, estimant que la régulation excessive risque de freiner l’innovation. « Les Etats-Unis sont les leaders du domaine de l’IA, et notre administration entend bien qu’ils le restent », a souligné J.D. Vance, le vice-président américain. Londres s’est également tenu à l’écart, préférant privilégier ses propres cadres réglementaires.

 

 

L’EUROPE ET L’ASIE PRONENT UN CADRE GLOBAL

Les signataires de la déclaration de Paris insistent sur la nécessité d’un « dialogue mondial » pour encadrer le développement de l’IA. Leur objectif est de construire un cadre de gouvernance internationale permettant d’éviter les dérives et de garantir que cette technologie serve le bien commun. « Nous avons besoin de ces règles pour que l’IA avance », a affirmé le président français Emmanuel Macron lors de la clôture du sommet.

Un des points majeurs de cette initiative est de prendre en compte l’impact écologique de l’IA. Un observatoire spécialement dédié à l’empreinte énergétique de cette technologie a ainsi été créé sous la supervision de l’Agence internationale de l’énergie, de même qu’une « Coalition pour une IA durable » réunissant diverses entreprises du secteur.

Le Premier ministre indien Narendra Modi a souligné la nécessité de ne pas laisser le Sud global à la traîne dans ce domaine. Avec ses 1,4 milliard d’habitants, l’Inde veut s’assurer que l’IA bénéficie également aux économies émergentes. Pour soutenir cette ambition, l’UE a annoncé un plan d’investissement de 200 milliards d’euros visant à renforcer la compétitivité européenne et à créer un écosystème favorable à une IA responsable.

 

 

La Chine est quant à elle disposée à collaborer avec les autres pays pour promouvoir le développement de l’IA, assurer sa sécurité et partager les avancées dans ce domaine, a déclaré le vice-Premier ministre chinois Zhang Guoqing, qui participait au sommet en tant que représentant spécial du président chinois Xi Jinping.

Face aux opportunités et aux défis engendrés par le développement de l’IA, il a appelé la communauté internationale à défendre conjointement le développement d’une IA au service du bien commun, à approfondir la coopération en matière d’innovation, à renforcer l’inclusion et à améliorer la gouvernance mondiale.

Il a aussi invité les développeurs du monde entier à participer à la prochaine Conférence mondiale des développeurs 2025, qui se tiendra du 21 au 23 février à Shanghai, en Chine.

 

WASHINGTON MISE SUR SA SUPREMATIE

Alors que L’Europe et l’Asie plaident pour la création d’un cadre mondial de gouvernance, les Etats-Unis aspirent à renforcer leur domination. L’administration Trump a récemment dévoilé « Stargate », un plan d’investissements dans l’IA d’une valeur de 500 milliards de dollars, démontrant ainsi sa volonté de conserver l’hégémonie américaine dans le domaine.

« Nous avons toutes les composantes nécessaires, dont la conception des semi-conducteurs et les applications transformationnelles. Disposer de la puissance de calcul nécessaire est essentiel pour faire progresser cette technologie et pour sauvegarder (notre) avance. Les Etats-Unis et leur président vont s’assurer que les systèmes les plus forts soient conçus aux Etats-Unis, avec des puces fabriquées aux Etats-Unis, » a affirmé J.D. Vance lors du sommet.

« Une réglementation excessive du secteur de l’IA pourrait tuer un secteur transformateur au moment même où il décolle », a-t-il ajouté. Pour lui, la perspective extraordinaire d’une nouvelle révolution industrielle propulsée par l’IA « ne se réalisera jamais si la sur-réglementation dissuade les innovateurs de prendre les risques nécessaires pour faire avancer les choses. »

Il a déploré que beaucoup de sociétés américaines soient confrontées aux « énormes réglementations de l’Union européenne », qui entraînent parfois des amendes ».

 

 

 

LA NECESSITE D’UNE COORDINATION GLOBALE

Au-delà de l’adoption d’une régulation de l’IA au niveau international, le développement technologique apparaît comme une nécessité. « Les puissances mondiales se concentrent aujourd’hui bien plus sur la course technologique que sur la réglementation », a déclaré Rémi Bourgeot, économiste et chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) de France.

« Même l’Europe, qui pensait pouvoir gérer la scène mondiale de l’IA en avançant plus vite que les autres en termes de réglementation, comprend désormais qu’elle doit développer ses propres infrastructures et ses propres capacités de développement de modèles pour concurrencer à la fois les Etats-Unis et la Chine », a-t-il ajouté.

« Le leadership mondial est encore à saisir », a déclaré au cours du sommet Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, notant que les analystes s’accordaient à dire que les Européens avaient encore la possibilité de rattraper leur retard dans la course à l’IA.

« Les Etats-Unis bénéficient d’investissements massifs et ont construit de vastes modèles. Cependant, l’open source permet à d’autres pays ayant des compétences suffisantes de rattraper rapidement leur retard de manière beaucoup plus économique, même avec des puces moins puissantes », a expliqué M. Bourgeot.

Dans ce contexte, les observateurs ne s’attendent pas à beaucoup d’actions immédiates coordonnées au niveau mondial en matière de régulation de l’IA. Une coordination globale sur la régulation de l’IA reste pourtant nécessaire. « La plupart des gouvernements sont confrontés à des défis similaires concernant les risques que représentent les modèles d’IA les plus puissants, de sorte qu’une coordination devra nécessairement avoir lieu dès que l’IA sera entrée dans une phase plus mature », a déclaré M. Bourgeot.

 

 

Pour Fu Ying, ancienne vice-ministre chinoise des Affaires étrangères, qui était aussi présente au sommet, ce n’est qu’en travaillant ensemble que tous les pays du monde seront en mesure de maîtriser les pouvoirs de l’IA.

« Si les pays affrontent séparément l’IA par eux-mêmes, celle-ci a le potentiel de vaincre l’humanité », a-t-elle averti.

 

By Xinhua

 

 

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