La guerre perpétuelle en RDC est un mépris pour la souveraineté de l’Afrique
Par Mike Omuodo
Une vibration du téléphone a attiré mon attention sur un message entrant : un ami avait envoyé un message avec une pièce jointe et une note disant : « C’est tellement triste et ça doit cesser ! Le message était suivi d’émojis en pleurs.
Curieuse, j’ai ouvert la pièce jointe. Il s’agissait d’une photo de certains carnages en République démocratique du Congo (RDC) – pour être plus précis, la photo de cadavres de personnes tuées dans la guerre sans fin de la RDC, empilés comme des déchets provenant d’un camion à ordures de la ville. Mon cœur a saigné pour les enfants et les femmes de la RDC, principales victimes de cette horrible guerre !
La guerre en République démocratique du Congo, qui a tué plus de 6 millions de personnes au fil des décennies, est un rappel brutal des défis internes et externes du continent. Malgré la richesse de l’histoire de l’Afrique, sa diversité culturelle et son potentiel croissant, la violence persistante en RDC représente l’incapacité des dirigeants africains et de la communauté internationale à faire face à une crise qui sape la notion même d’unité, d’indépendance et d’autodétermination de l’Afrique.
La RDC, dotée d’une abondance de ressources naturelles – diamants, or, cuivre, coltan – devrait être l’un des pays les plus prospères d’Afrique. Au lieu de cela, elle est devenue un champ de bataille où les milices locales, les entreprises étrangères et les puissances régionales exploitent ses richesses, laissant son peuple dans la pauvreté et la souffrance. Il s’agit là d’un affront direct à la vision de la souveraineté africaine, qui vise à garantir que les ressources africaines profitent aux Africains et non à des acteurs extérieurs ou à des élites corrompues.
L’incapacité des nations africaines à intervenir de manière décisive et à résoudre le conflit en RDC met en lumière une réalité douloureuse : alors que les dirigeants africains se sont faits les champions de l’unité et de la coopération par l’intermédiaire de plateformes telles que l’Union africaine (UA), ils ont largement échoué à protéger l’un des leurs contre des décennies d’exploitation et de guerre. Le silence et l’inaction de nombreux gouvernements africains face à la crise de la RDC sont un affront à l’idée du panafricanisme, qui promet la solidarité et l’action collective face à l’injustice.
La guerre en RDC est également le reflet de la manière dont les intérêts étrangers continuent de s’immiscer dans les affaires africaines, sapant ainsi la souveraineté de l’Afrique. Depuis l’époque coloniale, des puissances extérieures ont exploité les ressources naturelles de la RDC, laissant le pays dans un état de conflit perpétuel. Aujourd’hui, les multinationales et les gouvernements étrangers continuent de tirer profit de l’extraction illégale des minerais de la RDC, finançant les groupes armés et prolongeant l’instabilité.
Les dirigeants africains ont l’obligation morale et politique d’affirmer le contrôle de l’Afrique sur ses propres ressources et son territoire. Permettre à des acteurs étrangers de dicter le destin de l’une des nations les plus riches du continent ne diminue pas seulement la souveraineté de la RDC, mais affaiblit également la capacité du continent tout entier à défendre ses intérêts économiques et politiques.
Gouvernance défaillante
L’échec de la gouvernance est au cœur de la crise en RDC. Si les acteurs extérieurs ont joué un rôle important dans le conflit, les divisions internes, la corruption et la faiblesse du leadership au sein de la RDC ont exacerbé la situation. Les gouvernements successifs ont lutté pour maintenir le contrôle sur de vastes portions du pays, permettant aux seigneurs de la guerre et aux milices de combler le vide du pouvoir.
Cependant, l’échec le plus important réside dans l’incapacité des dirigeants africains à s’unir et à résoudre ces problèmes internes par la pression diplomatique, la consolidation de la paix et une intervention vigoureuse. Au lieu de cela, certaines puissances régionales ont été accusées de déstabiliser davantage le pays en soutenant les groupes rebelles et en exploitant le chaos à leurs propres fins. Ce manque de leadership prolonge non seulement la souffrance de millions de Congolais, mais érode également la confiance dans la capacité de l’Afrique à résoudre ses propres problèmes.
Impératif stratégique
Cette guerre ne doit pas être considérée comme un simple problème congolais, mais comme un impératif moral et stratégique pour l’ensemble du continent africain. Le conflit en cours compromet les objectifs collectifs de l’Afrique en matière de paix, de sécurité et de développement économique. Il déstabilise une région essentielle pour l’avenir de l’Afrique, limite la croissance économique et détourne l’attention de questions continentales urgentes telles que la lutte contre la pauvreté, le développement des infrastructures et les soins de santé.
Permettre à la RDC de rester en état de guerre ou même de dégénérer davantage dans l’abîme donne une mauvaise image de l’Union africaine et des organisations régionales telles que la Communauté de l’Afrique de l’Est et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), qui ont la capacité de servir de médiateurs et d’intervenir. Si les dirigeants africains n’agissent pas maintenant pour mettre fin à la violence et instaurer une paix durable, cela signifiera qu’ils ne respectent pas les principes fondateurs de ces organisations et l’indépendance de l’Afrique elle-même.
Recouvrer la souveraineté
Cette guerre n’est pas seulement une catastrophe humanitaire ; elle constitue un défi direct à la capacité de l’Afrique d’affirmer son contrôle sur son propre destin. Le conflit a mis en évidence la fragilité de la souveraineté africaine et la vulnérabilité des vastes ressources du continent à l’exploitation extérieure. Pour tenir la promesse d’une Afrique unie, indépendante et prospère, les dirigeants africains doivent se montrer à la hauteur, réclamer la souveraineté de la RDC et mettre un terme à cette guerre insensée.
L’inaction ou la diplomatie passive ne feront qu’aggraver les blessures et prolonger les souffrances. Il est temps pour l’Afrique de montrer l’exemple, d’affirmer sa volonté politique et d’éviter que la RDC ne devienne une cicatrice permanente sur l’héritage du continent. La guerre en RDC ne peut être autorisée à se poursuivre comme un mépris de la souveraineté de l’Afrique.
Mike Omuodo est un expert panafricain en relations publiques et en communication basé à Nairobi, au Kenya
Contact de la rédaction : redaction@afrique54.net