RDC : des villages, jadis occupés par le M23, toujours hantés par les atrocités (REPORTAGE)
► Les habitants des zones jadis occupées par la rébellion du Mouvement du 23 Mars (M23) dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) se disent toujours « hantés » par les atrocités et les exactions commises contre les civils.
Bisimwa Rukunda, un homme de 41 ans père de six enfants interrogé à Kilolirwe dans la province du Nord-Kivu (est), a dit avoir reçu au moins trois balles dans la jambe tirées par le M23 au cours d’une soirée où l’armée congolaise a été chassée après plusieurs heures de combat avec les rebelles.
« Ils m’ont forcé d’abord parmi plusieurs autres personnes d’enterrer les cadavres des militaires » des Forces armées de la RDC (FARDC) « et quelques civils du village tués au combat. Après, le soir, quelques membres de la rébellion m’ont suivi à la maison et ont lancé plusieurs balles sur moi alors que je dormais », a-t-il raconté à Xinhua en estimant que les rebelles le considéraient comme un témoin gênant de la situation vécue à Kilolirwe.
Si M. Rukunda a survécu à ses blessures, la femme de Jacques Mihigo, un autre habitant de Kilolirwe, n’a pas eu cette chance après avoir reçu une balle dans la tête quelques jours après la prise de la ville par les rebelles du M23 en début d’année.
« Ils ont tiré une balle dans la tête de ma femme alors qu’ils étaient en train de mener les opérations de fouille dans les maisons des civils à la recherche des militaires des FARDC », a affirmé à Xinhua Jacques Mihigo.
Joint au téléphone par Xinhua, Willy Ngoma, porte-parole militaire du M23, a nié les accusations de la population contre son groupe.
A Kibumba, toujours dans le Nord-Kivu, dernière position occupée en novembre dernier par les rebelles, la population accuse le M23 d’avoir complètement saccagé l’Hôpital général de référence de la ville. Ses matériels et autres équipements ont été détruits ou emportés.
« Nous essayons de reconstruire notre quotidien comme c’était avant dans notre cité de Kibumba. Mais comment faire lorsque nous ne pouvons même plus avoir les moyens de nous soigner lorsqu’on tombe malade simplement parce que l’hôpital est hors service ? Les rebelles ont tout détruit », déplore Wawina Kasemire, une jeune femme.
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Déplacée par les conflits depuis novembre dernier, elle dit avoir pris la décision de revenir dans son village après avoir passé trois mois sur le site des déplacés de Kanyaruchinya en périphérie de Goma, le chef-lieu du Nord-Kivu, avec toute sa famille en raison des conditions précaires dans lesquelles vivent les personnes déplacées dans ce camp.
« Je suis rentrée seule et toute ma famille se trouve toujours dans le camp à Goma. Moi, je dois me battre ici avec la récolte de quelques produits vivriers de notre champ afin de préparer le retour complet de notre famille d’ici là », a-t-elle martelé.
A Kibumba, comme d’autres villages situés dans les zones de conflit, les infrastructures publiques, plus particulièrement les écoles et les bureaux de l’Etat, ont subi des dommages collatéraux suite aux combats et à la présence des rebelles.
Plusieurs autres personnes interrogées dans les zones cédées par les rebelles et actuellement sous le contrôle des contingents de la Force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) ont fait mention d’exactions par les rebelles du M23 lors des combats avec l’armée congolaise. Des groupes armés locaux présents dans les zones de conflit sont aussi accusés par plusieurs organisations nationales et internationales, dont l’ONU, d’y avoir commis des exactions graves contre la population civile.
Depuis le début du déploiement de la Force régionale de l’EAC, quatre pays ont déjà envoyé des troupes sur le terrain en RDC, à savoir l’Ouganda, le Kenya, le Burundi et le Soudan du Sud, couvrant ainsi la totalité des zones jadis occupées par les rebelles du M23.
Les combats entre l’armée congolaise et le M23, qui ont repris début 2022, ont poussé des milliers des personnes à fuir leur domicile pour trouver refuge dans les camps des déplacés situés en périphérie de Goma.