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Afrique centrale : la fin de la crise des devises n’est pas pour demain

Afrique centrale : la fin de la crise des devises n’est pas pour demain

Les mesures prises par la Beac pour mettre un terme à la crise des devises qui sévit depuis des mois en Afrique centrale, se heurtent à une réalité dictée par les grandes firmes pétrolières qui opèrent dans la sous-région.

De Bangui à Brazzaville en passant par Douala et Bata, jusqu’à Port Gentil, les devises se font rares dans chacune de ces économies. Une situation qui ne laisse aucun acteur économique indifférent, y compris au plus bas de la chaine, au niveau des ménages. « Emprunter un taxi le matin lorsque vous n’avez pas de pièce est un sérieux problème. Vous pouvez facilement passer une heure à attendre le taxi, nous confie Bernadette, résidente du quartier Ndogbassi et en service dans entreprise de la place dans la ville de Douala. Il faut donc agir en urgence, agir au plus vite pour remettre les devises dans les échanges ! Car les entreprises qui ont besoin d’importer sont au bord de l’asphyxie. Faute de pouvoir obtenir les devises nécessaires auprès des banques locales pour réaliser leurs transactions.

Des réserves de devises en baisse

Le choc pétrolier qui a frappé de plein fouet la zone Cemac à partir de 2014, n’a pas fini d’avoir des effets néfastes sur les économies des pays de la sous-région. L’effondrement de leurs revenus pétroliers a entraîné la fonte des réserves de change, dont 5 pays de la Cemac sur 6 sont fortement dépendants de cet or noir. Pour éviter la pénurie de devise, plusieurs pays reçoivent le soutien du FMI. Ils préfèrent l’ajustement budgétaire à l’ajustement monétaire, c’est-à-dire la dévaluation du CFA, que chaque gouvernement redoute dans un contexte de récession économique. De son côté la Beac met la pression sur les banques pour qu’elles rapatrient vraiment leurs devises sur son compte d’opération plutôt que de les conserver à l’étranger. Ces réserves de change représentent aujourd’hui presque l’équivalent de trois mois d’importation.

Des mesures assujetties de sanctions

La situation est bien plus complexe que cela en a l’air. Depuis des années, les banques ont pris des libertés avec la règle du jeu. Elles préfèrent conserver les devises à l’étranger pour faciliter les opérations, pour éventuellement faire du trading de devises entre elles et gagner de l’argent plutôt que de les rapatrier à la Beac en échange du francs CFA. Aujourd’hui, le montant des devises en sommeil à l’étranger représente l’équivalent des réserves actuelles de la Beac. Elle a longtemps fermé les yeux sur ces pratiques, jusqu’au moment où elle a voulu rompre avec elles. Ce sursaut de rigidité a mené tout droit à cette crise actuelle des devises qui sévit.

La Beac s’est engagé à débloquer les transferts envers les coupables, et en échange les banques sont obligées de fournir le nom des entreprises demandeuses, ces dernières seront donc informées par la Beac de l’évolution de leur dossier. En clair, la banque centrale s’engage à donner une suite favorable aux demandes de sortie des devises des opérateurs économiques qui lui sont adressées, sans tenir compte des devises que les banques détiennent à l’extérieur de la zone Cemac. En contrepartie, la banque centrale régionale sanctionnera les banques qui détiennent des réserves de changes injustifiées avec une amende correspondant à 5 % du montant concerné.

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Le rôle trouble des entreprises pétrolières

Malgré la décision saluée depuis le 04 juillet de la Beac d’injecter dans le circuit de nouvelles devises au terme du « compromis de Douala », un épais nuage continue de planer sur cette mesure encore attendue. De gros écueils liés aux entreprises pétrolières perdurent encore sur ce sentier. Elles non plus ne rapatrient pas leurs bénéfices en zone Cemac, et elles n’ont pas l’intention de le faire par manque de confiance dans le système bancaire local, par crainte de voir l’Etat bloquer leurs fonds pour exercer des pressions. Et puis il y a de gros points d’interrogation sur l’avenir selon Thibaut Bidet, Conseiller financier à l’ambassade de France au Cameroun : une fois que les versements de bailleurs seront interrompus la reconstitution des réserves pourrait très vite capoter à cause de l’érosion des recettes pétrolières. Les cours ne retrouveront pas les niveaux des années 2010 et la production décline sans que l’économie de la région ne se soit vraiment diversifiée. A moyen terme la rareté des devises restera une plaie pour l’économie de la région.

 

Par Thierry Eba l Afrique-54.com

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